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"Venez découvrir l'univers Rock n'Roll de cette historienne et passionnée de livres anciens au parcours atypique."

Priscille Lamure

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Clé d'or

 

"Formée à l'université en Histoire et histoire de l'art, titulaire d’un Master, Priscille  LAMURE est l’auteure de « Drôles d'histoires ! » et « Dans les oubliettes de l’Histoire »  parus aux Editions du Trésor, une joyeuse compilation d’anecdotes historiques. 

Elle est également scénariste pour « Autant en emporte l’Histoire » sur France Inter et  rédactrice pour RétroNews, le site de la Bibliothèque Nationale de France. 

Passionnée et férue d’Histoire, dévoreuse de vieux manuscrits, farfouilleuse d’archives,  Priscille ne manque ni d’humour, ni de subtilité, et devient pour France Bleu, à partir  de janvier 2022, la plume et la voix de « La France : toute une Histoire !»."

Pourrais-tu dans un premier temps, présenter ton parcours que je trouve particulièrement intéressant ? Tu n’es pas issue d’un parcours classique, bien au contraire.

 

Houla, non ! J’ai tout d’abord entamé une carrière de danseuse, avant de me rendre compte, au bout de cinq années, que ce milieu n’était vraiment pas fait pour moi. À 23 ans, j’ai décidé de changer de voix : je voulais bosser dans la culture, dans la transmission et la démocratisation des savoirs, mais je ne savais pas par où commencer. Je me suis inscrite à la Sorbonne en Médiation culturelle, une formation qui mêle histoire, histoire de l’art, littérature, cinéma, théâtre, danse, mais aussi sociologie et droit appliqué à la culture. Bref, de quoi se faire un bon bagage pour aller bosser dans le secteur. Master en poche, j’ai enchaîné divers boulots, notamment à la Monnaie de Paris qui présentait alors ses toutes premières expos d’art contemporain, mais je n'étais pas pleinement épanouie.

 

Quel a été pour toi, le moteur ou le déclencheur afin de t’orienter vers le milieu du patrimoine écrit et notamment en tant que libraire de livres anciens ?

 

Alors attention, je ne suis encore qu’un bébé libraire ! Depuis 2019, je travaille à la librairie Jean-Étienne Huret à Paris, où l’on vend des livres anciens, manuscrits et autographes, mais aussi de nombreux livres d’occasion parus au XXe siècle. Je me suis tournée vers le livre ancien parce que j’ai toujours aimé les vieux livres, leur histoire, leur odeur, le caractère unique de chacun d’eux. En 2017, j’ai commencé à me former en autodidacte en lisant plein de livres et des catalogues de vente de livres anciens. Au départ, je ne bitais rien, c’était assez laborieux. Et puis j’ai suivi tout un séminaire en auditeur libre à l’ENS intitulé “De l’histoire du livre à l’étude des textes”. C’était passionnant !

 

Tu as une formation en paléographie, que tu as suivi en auditeur libre auprès de l’école des Chartes, ce qui n’est pas des moindres, peux-tu nous dire à quel niveau cette formation a été bénéfique dans tes recherches d’historienne et d’écrivaine ?

Oui, la paléographie, c’était clairement un skill qui me manquait pour déchiffrer les vieilles écritures. J’ai validé le niveau intermédiaire, donc le deuxième cycle, ce qui m’a permis d’étudier les écritures anciennes du Moyen Âge au XVIIIe siècle. La plus grosse difficulté étant de déchiffrer les écritures cursives griffonnées à l’arrache sur un coin de bureau, notamment des actes notariés qui m’ont fait gagner des cheveux blancs ! Ça m'a aussi beaucoup aidée à l’époque pour mes recherches en archives dans le cadre de l’écriture de mes articles pour le blog Savoirs d’Histoire.

Car, oui ne l’oublions pas, tu as écrit deux livres, jusqu’à présent, je ne crois pas me tromper en avançant, que tu travailles sur d’autres projets d’écriture. Peux-tu déjà nous en parler en quelques lignes ou as-tu l’obligation de tenir encore secret ces projets ?

Oui, les deux premiers livres Drôles d’histoires ! (2018) et Dans les oubliettes de l’histoire (2021) sont des recueils d’anecdotes historiques truculentes, en grande partie issues de mes publications pour le blog. Pour ce qui est du troisième livre, je ne peux pas trop en dévoiler le contenu pour le moment, mais ce que je peux dire c’est qu’il s’agit d’un livre jeunesse qui sera publié chez Nathan en fin d’année 2022 et dans lequel j’ai mis une bonne dose de féminisme, ce qui était aussi la volonté de l’éditrice qui m’a contactée pour ce projet. Je n’avais jamais écrit pour la jeunesse et j’ai adoré cette expérience. D’ailleurs j’ai hâte que ma fille puisse le lire. Le problème c’est qu’elle n’a que 11 mois... Il s’agirait de grandir un peu ! :D

 

Tu as un blog depuis plusieurs années dans lequel tu as écrit de nombreux articles et qui ont certainement servi de support à l’écriture de tes ouvrages. Ton écriture est incisive et pétillante. Te lire est un vrai régal. Il serait intéressant de connaître ta méthode de travail, comment sélectionnes-tu les anecdotes sur lesquelles tu écris ? As-tu une idée de thématique avant tes recherches ou fonctionnes-tu à l’instinct ?

J’ai publié des articles sur le blog Savoirs d’histoire de 2015 à 2020. En ce moment, je suis en “hibernation”, car depuis la naissance de ma fille je n’ai plus assez de temps à consacrer à ce gros travail de recherche et d’écriture. À l’origine, l’idée était de partager des anecdotes ou des événements historiques qui me passionnent et pour lesquels j’avais effectué des recherches approfondies. Les sujets ont donc toujours été en lien avec mes centres d’intérêt : les femmes, la sorcellerie, les croyances et superstitions anciennes, la sexualité, mais aussi, bien sûr, la bibliophilie ! Pour écrire mes articles, je réunis le maximum d’archives et des travaux récents d’historiens et d'historiennes qui traitent de mon sujet puis je me lance dans l’écriture en y laissant ma petite touche perso et toujours beaucoup d’humour.

 

Pour reprendre la thématique bibliophilique que représente pour toi l’univers de la bibliophilie, comment l’abordes-tu ?

La bibliophilie, c’est une perpétuelle source d’émerveillement. C’est un peu comme un monde magique qu’on n'aura jamais fini de découvrir. Parce que, hier comme aujourd’hui, des livres anciens, il y a en a de toutes les tailles et de toutes les formes. On peut parler du livre de ceinture, ce type de codex médiéval dont la reliure était prolongée d’un pan de cuir pour pouvoir le suspendre à la ceinture des moines. Ou encore des antiphonaires géants, tellement lourds qu’il fallait les consulter sur un lutrin. Et des livres miniatures au format ridicule, mais si mignons... Sans compter les reliures, qui sont dans certains cas de véritables œuvres d’art, quand elles ne sont pas faites de peaux humaines (quoi, vous l’ignoriez ? Lisez donc mon dernier livre pour en savoir plus…). Et je ne parle même pas des manuscrits ou des envois d’auteurs, qu’on a parfois l’honneur de tenir entre ses mains. Bref, la bibliophilie, c’est beaucoup de découvertes et d’émotions...

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As-tu de ton côté, une expérience en tant qu’acheteur ou au contraire cela reste-t-il assez marginal ?

J’ai acheté quelques livres atypiques pour ma collection personnelle, mais j’essaie de ne pas craquer devant la première reliure sexy venue. Sinon, quand on travaille au quotidien entouré de livres à vendre, c’est la ruine assurée !

 

Comment envisages-tu l’avenir autour du livre ancien, et notamment d’un point de vue professionnel ?

Je souhaite que le plus grand nombre de librairies anciennes restent ouvertes, malgré la concurrence du marché sur internet. La réalité, c’est qu’aujourd’hui tout passe par internet, d’autant plus que beaucoup d’acheteurs résident en Amérique ou en Asie. En ce qui me concerne, la librairie dans laquelle je travaille actuellement est sur le point de baisser définitivement le rideau courant 2022 (le libraire à 88 ans) et je n’ai pas encore décidé précisément de ce que je ferai par la suite… Affaire à suivre donc !

 

Penses-tu que les réseaux sociaux ont permis de rendre de manière plus lisible et ludique l’univers bibliophilique qui reste encore assez méconnu du grand public ?

Oui ! Aujourd’hui, toutes les grandes bibliothèques à travers le monde sont sur instagram et partagent des contenus photo ou vidéo relatifs à leurs collections. Je trouve que c’est une nouvelle fenêtre qui s’ouvre sur la bibliophilie : accessible, démocratisée, documentée… Ça permet de rappeler à tous qu’il n’est pas nécessaire d’être un expert pour aimer les beaux livres !

 

Quels seraient, à ton avis les moyens et les méthodes pour rendre cet univers plus abordable au service du grand public ?

Je pense qu’il faut multiplier ces initiatives visant à expliquer et ouvrir l’univers de la bibliophilie au plus grand nombre, avec un langage adapté et compréhensible pour tous.

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Tu as permis par ailleurs de rendre plus visible la libraire Huret à travers un compte Instagram avec lequel tu as su faire une sélection tout à fait charmante. Qu’est-ce que cette expérience t’a apporté sur le plan professionnel ?

Aujourd’hui la page de la librairie est un peu en stand-by, car nous avons beaucoup de travail à la librairie et diffuser des contenus sur Instagram est très chronophage. Mais ce que cette mise en avant sur les réseaux sociaux m’a appris, c’est que l’on peut vendre des livres anciens via Instagram à une toute nouvelle clientèle, notamment des jeunes et des néophytes qui n’auraient jamais poussé la porte grinçante d’une librairie ancienne si celle-ci n’était pas venue à eux, directement sur leur téléphone !

 

Je sais que l’Histoire est l’élément central qui a guidé en quelque sorte tes choix professionnels et notamment cette approche avec le livre ancien. Que représente pour toi, cette satisfaction de pouvoir travailler avec les livres anciens ?

Pour moi, c’est un voyage dans le temps. Manipuler et lire, ou simplement feuilleter un livre ancien, c’est flirter avec le passé. Tous ces livres sont des objets d’histoire, des artefacts qui ont leur propre vécu, sont passés de mains en mains, ont été chéris, précieusement conservés, et on y trouve souvent des marques d’appartenance. Il y a l’histoire que racontent les pages du livre et l’histoire de l’objet en lui-même. C’est d’une richesse !

 

Je ne fais pas du féminisme un combat de tous les jours, cependant je trouve qu’il est toujours intéressant d’avoir un point de vue féminin concernant l’approche bibliophilique, surtout au vu de cet univers qui est toujours « dominé » par les hommes en général. Comment pourrais-tu expliquer ce phénomène. Même si de plus en plus de librairies sont également dirigées par des femmes.

C’est vrai qu’historiquement les femmes sont moins nombreuses que les hommes dans ce milieu dont l’âge moyen est d’ailleurs proche de celui d’entrée en EHPAD. Je crois très fort – et j’appelle de mes vœux, comme disent les gens chics – que la nouvelle génération de libraires va dépoussiérer un peu l’image austère de la bibliophilie et du vieux libraire reclus au fond de sa librairie. Mais la révolution est déjà en marche : je pense notamment à la librairie Camille Sourget, rue de Seine à Paris, avec son équipe jeune et exclusivement féminine. C’est ça qu’on veut !

Pourrais-tu nous expliquer comment se déroule une journée type dans la vie d’un libraire ?

Disons-le franchement, ce n’est pas très glamour ! Le matin, je m’occupe des commandes faites via les sites de vente en ligne comme Abebooks : je sors les livres commandés par les clients et je prépare les paquets pour l’expédition. L’après-midi, la librairie est ouverte au public et m’occupe des clients en boutique. Au quotidien, c’est beaucoup de rangement, de paquets, de port de charges lourdes. Au début je venais à la librairie en robe et talons, aujourd’hui c’est jean et doc Martens, avec un bon vieux t-shirt de groupe de métal sous mon pull... Mais chut !

 

En poursuivant dans cette direction, pourrais-tu nous donner les qualités et les inconvénients d’un tel métier ?

Ce qui est sûr, c’est qu’il faut être passionné, car il y a beaucoup de choses à apprendre, en continu, et qu’il faut avoir la curiosité d’aller chercher les informations pour toujours répondre le mieux possible aux recherches des clients. Moi j’aime beaucoup l’idée de découvrir et d’apprendre tous les jours, c’est une des raisons pour lesquelles je fais ce métier. Les aspects moins funs sont ceux qui touchent à la manutention : faut pas avoir peur de se casser un ongle quoi !

 

Quels conseils pourrais-tu donner aux jeunes générations qui aimeraient se lancer dans cette branche ?

Foncez ! Le métier de libraire, ça s’apprend aussi beaucoup sur le terrain, donc faites des stages en librairie, lisez, soyez curieux ! On aura toujours besoin de bons libraires capables de dénicher LE livre qui mettra des paillettes dans les yeux du client.

 

Pour terminer, aimerais-tu faire passer un message particulier ou un coup de cœur actuel autour de l’univers du livre ?

Mon dernier coup de coeur bouquin, c’est Un texte un femme (2021), le dernier livre de Sarah Sauquet publié après le succès de son application Un texte une femme qui met en lumière des écrits féminins à travers l’histoire. Le livre réunit 366 textes, soit un par jour à déguster tout au long de l’année (ou pas !), et pas moins de 110 autrices de diverses nationalités et époques. Je n’ai pas encore terminé ma lecture, mais j’y ai déjà fait de belles découvertes. Idéal comme livre de chevet !

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Je remercie chaleureusement Priscille pour s'être prêtée au jeu de l'interview et de nous dévoiler ainsi son parcours ainsi que ses projets.

Je vous invite à vous procurer ses deux ouvrages parus aux Editions du Trésors.

Par ailleurs, comme vous avez pu le constater dès le début de ce portrait, Priscille anime à présent une chronique quotidienne autour de l'Histoire de France que je vous propose de découvrir, si ce n'est déjà fait à travers le lien ci-dessous :

Toutes les photos proviennent du compte Instagram de Priscille avec son aimable autorisation.

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